Les Priorités de la R&D sur la Pollution Plastique.

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Date de publication 27 juillet 2020

Auteurs Provencher, J. F.; Liboiron, M.; Borrelle, S. B.; Bond, A. L.; Rochman, C.; Lavers, J. L.; Avery-Gomm, S.; Yamashita, R.; RYAN, P. G.; Lusher, A. L.; Hammer, S.; Bradshaw, H.; Khan, J.; Mallory, M. L.

Sources A Horizon Scan of research priorities to inform policies aimed at reducing the harm of plastic pollution to biota. The Science of the total environment, (2020) vol. 733, p. 139381.

DOILink http://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2020.139381

Résumé

Résumé :

La pollution plastique dans les océans est un enjeu environnemental prioritaire. L’augmentation récente de la recherche sur le sujet, conjuguée à une sensibilisation croissante du public, a incité les décideurs du monde entier à identifier et mettre en œuvre des solutions qui minimisent les dommages causés par la pollution plastique. Pour soutenir et coordonner ces efforts, les auteurs de cet article ont interrogé des experts ayant une expérience scientifique identifiée dans leurs publications évaluées par des pairs. Ils ont interrogé des experts sur les questions de recherche les plus pressantes relatives à la façon dont le biote interagit avec la pollution plastique. Ceci permet d’éclairer les décisions politiques et les programmes de recherche afin de contribuer au mieux à la compréhension et à la réduction des méfaits de la pollution plastique sur le biote. Les auteurs ont utilisé une méthode modifiée d’analyse Horizon qui a d’abord fait appel à un sous-groupe d’experts pour générer 46 questions de recherche sur le biote aquatique et les plastiques, avant une enquête en ligne auprès des chercheurs du monde entier permettant de prioriser les questions en termes d’importance pour éclairer l’élaboration des politiques. Cent quinze experts de 29 pays ont classé les questions de recherche en six thèmes. Les questions ont été classées par critère d’urgence, indiquant quelles recherches devraient être traitées immédiatement, lesquelles peuvent être traitées plus tard, et lesquelles sont d’une pertinence limitée pour éclairer l’action sur les plastiques en tant que polluant environnemental. Les questions relatives aux quatre thèmes suivants étaient les priorités de recherche les mieux classées : (i) les sources, la circulation et la distribution des plastiques, (ii) le type de dommages causés par les plastiques, (iii) la détection des plastiques ingérés et les problèmes connexes, et (iv) les économies et la politique liées aux plastiques ingérés. Bien qu’il existe de nombreuses questions de recherche sur les impacts de la pollution plastique sur le biote qui pourraient être financées et étudiées, ces résultats concentrent les priorités collectives en termes de recherche qui, selon les experts, éclaireront des politiques efficaces et une mise en oeuvre sur le terrain.

Avis The SeaCleaners :

Le problème de la pollution plastique généralisée et la prise de conscience du grand public ont incité fortement les pouvoirs politiques à mettre en place des décisions visant à endiguer ce problème environnemental global.
Les auteurs de cette étude se sont tout d’abord tournés vers les scientifiques, afin de comprendre l’étendue du problème et ses impacts tant sur les écosystèmes que sur l’activité économique. Cet article présente l’analyse des réponses de 150 experts scientifiques concernant le problème de la pollution plastique et les priorités à mettre en avant en termes de recherche et de développement. Parmi les grands thèmes abordés, les quatre premiers par ordre de priorité sont les suivants : premièrement, comprendre les sources des différentes pollutions plastiques et leur distribution ; deuxièmement mieux comprendre les impacts de cette pollution sur les écosystèmes et sur la santé humaine ; troisièmement, mettre en évidence les types et les quantités de plastique qui sont ingérés par les animaux et par les hommes et en comprendre les impacts ; quatrièmement, comprendre les impacts économiques et les effets de différentes politiques sur la gestion de la pollution plastique en particulier celle qui est ingérée et qui se retrouve dans le circuit alimentaire humain.

Les thèmes de recherche les moins urgents selon les scientifiques sont aussi intéressants à analyser.
Celui classé en 46ème place, donc dernière place, concerne le lien entre la pollution plastique aquatique ou océanique et le changement climatique. Ce classement en priorité basse montre bien que, malgré de nombreux articles journalistiques, ce lien est considéré comme faible, si ce n’est l’utilisation des ressources fossiles pour produire les plastiques. Mais la pollution en elle-même n’apporte pas d’effet notable complémentaire. Le thème en 45ème place, donc avant dernier, concerne la propagation des espèces pathogènes à partir des plastiques. Cet article a été écrit avant la pandémie de la Covid19. Il serait intéressant de voir si les avis des scientifiques ont changé depuis. Toutefois, ce classement en priorité basse montre le risque faible de cette hypothèse d’impact sur la distribution des espèces invasives et des pathogènes.

L’approche de cet article, bien qu’exhaustive sur le plan scientifique ne concerne qu’une partie du problème car elle n’aborde pas le modèle économique de notre société.
En effet, quelles que soient les décisions politiques, il n’est pas envisageable de réduire significativement la pollution plastique sans modifier profondément le système économique et en particulier éliminer tous les objets à usage unique et toute l’hyper production qui consomme énormément de ressources et qui, à terme, ne permettra de gérer ni les déchets ni la pollution. Un des problèmes de recherche et développement majeur, qui est rarement abordé dans les études, est d’ordre politico-économique : il s’agit de comprendre où placer la valeur ajoutée dans un nouveau système économique et où placer les profits des différents acteurs en se passant du modèle d’hyper-production et de société de consommation. Cette étude montre aussi la position des scientifiques au regard de la pollution plastique. La remise en question du modèle économique n’apparaît pas dans les thèmes, juste la mise en évidence du problème. Les plastiques à usage unique sont très largement utilisés dans les laboratoires pour effectuer les analyses. Est-ce justifié, au nom de la science, comme au nom de la sécurité ? Apparemment, ce sujet n’est pas encore d’actualité.

Une production forestière durable a déjà son aménagement routier.
En effet, pour effectuer les plantations sur des terrains préparés à recevoir les jeunes arbres, il est nécessaire d’avoir déjà mis en place une structure de routes d’accès empierrées ou goudronnées selon les usages nécessaires. Le cas présenté dans cet article, où la nécessité de construire de nouvelles routes forestières est présentée, indique que l’on est dans la situation d’une exploitation de ressources sauvages. Celle-ci peut toutefois s’avérer durable si une politique de plantation est mise en place afin de compenser les prélèvements. Le contexte de l’étude présentée ici semble être dans le sens d’une plus grande exploitation de ressources forestières sauvages. Il n’est donc pas illogique, dans ce contexte, que les acteurs envisagent d’utiliser des déchets industriels comme source de matières premières. L’objectif est clairement le développement économique et le profit de l’exploitation forestière sans considération pour les impacts environnementaux.

Des cendres d’incinérateur et des déchets plastiques permettent d’élaborer un nouveau revêtement routier.
Il s’agit d’utiliser du polyéthylène haute densité qui résulte de la récupération des déchets plastiques ménagers ne pouvant pas entrer dans des procédés de recyclage. Après broyage en fines particules et chauffage, ces débris plastiques forment le liant qui remplace le goudron. La partie minérale du revêtement est apportée par les cendres d’incinérateur. Dans les deux cas, ces matériaux sont considérés comme polluants. En effet, les déchets plastiques non recyclables contiennent de nombreux composés chimiques, additifs, colorants, retardateurs de flamme … qui sont des polluants persistants dans l’environnement. Ils seront libérés progressivement sous l’action de l’eau et de l’érosion. De même, les cendres d’incinérateur sont connues pour contenir des quantités importantes de métaux lourds. C’est pourquoi elles sont considérées comme des déchets ultimes et sont donc difficiles à utiliser dans d’autres applications. Elles finissent souvent dans des ciments ou comme ici dans des agents de charge pour des matériaux.

Une pollution chimique volontaire pour augmenter les profits.
C’est le bilan que présente cette étude scientifique sans pour autant en parler. En effet, les caractéristiques du nouveau matériau développé sont techniquement acceptables pour la construction de routes mais les impacts environnementaux ne sont pas abordés. L’usage intensif de ces routes forestières par des camion chargés de bois va provoquer une usure rapide qui va libérer les poussières de microparticules de plastique et de cendres dans l’environnement, favorisant la diffusion des polluants chimiques et des microplastiques. Les pluies et le ruissellement se chargeront de transporter ces pollutions vers les rivières et finalement vers l’océan. Les auteurs présentent cette avancée technique comme ayant un effet très positif sur la profitabilité de la construction des routes forestières. Une conclusion similaire avait été avancée dans l’utilisation de bombes atomiques en génie civil après son essai pour le creusement d’un lac artificiel non loin de la zone de cette étude. Le lecteur pourra se faire sa propre opinion sur cette approche que l’on a quand même du mal à considérer comme scientifique ou disons une science sans conscience du respect de l’environnement.

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