Production de bioplastiques à partir de déchets.

SV8
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Date de publication 25 mai 2020

Auteurs Surendran, Arthy; Lakshmanan, Manoj; Chee, Jiun Yee; Sulaiman, Azlinah Mohd; van Thuoc, Doan; Sudesh, Kumar.

Sources Can Polyhydroxyalkanoates Be Produced Efficiently From Waste Plant and Animal Oils? (2020) Frontiers in bioengineering and biotechnology : 8, 169.

DOILink https://doi.org/10.3389/fbioe.2020.00169

Résumé

Résumé :

Cet article présente une revue de l’état des connaissances sur l’utilisation des huiles brutes et usagées de l’industrie du poisson et de l’huile de palme pour la biosynthèse des polyhydroxyalcanoates (PHA), qui ont le potentiel de remplacer certains plastiques d’origine pétrochimique. Les PHA appartiennent à la famille des polyesters et sont produits naturellement par différents types de bactéries et d’archéobactéries sous forme d’inclusions insolubles dans leur cytoplasme. Leur accumulation intracellulaire dépend des conditions de culture. Un excédent de carbone est nécessaire dans les nutriments de même que des teneurs limitantes en azote, soufre, phosphore ou oxygène. Ces conditions ont été optimisées dans les procédés industriels afin de réduire les coûts de production des PHA commerciaux. Ils constituent une famille de polyester biodégradable. La fermentation bactérienne utilise différentes sources de carbone qui sont le point clef des coûts de production en particulier pour la création d’unité de production de grande taille. C’est pourquoi des sources constituées de déchets sont expérimentées par de nombreuses équipes dans le monde car elles ont un coût nettement inférieur. Les huiles produites à partir de plantes ou d’animaux sont une excellente source de nutriments permettant d’obtenir des rendements élevés de production en PHA. Les filières de déchets des huileries ou de la collecte des huiles usagées sont autant d’opportunités à faible coût qui sont utilisées. Elles permettent la production de PHA à bas prix, et apportent aussi un service de dépollution dans la filière huile. L’optimisation génétique des souches de bactéries permet d’améliorer la productivité et la sélection des types de monomères qui sont produits. En plus d’un tour d’horizon sur ce sujet, le niveau de biodégradabilité du PHA est également examiné dans cet article.

Avis The SeaCleaners :

Les bactéries « font du gras » en plastique.
Non, les bactéries ne fabriquent pas des objets en plastique, mais dans certaines conditions environnementales qui limitent leur accès aux matières nutritives, elles font des stocks. Et pour éviter que ces derniers ne prennent de la place dans la cellule et ne se dispersent, elles font souvent ces stocks sous forme de polymères insolubles dans l’eau. Pour se nourrir, les organismes vivants ont besoin d’une proportion de matières nutritives optimale. Au niveau élémentaire (atomique) ce besoin est observé dans les rapports carbone/azote (C/N) ou azote sur phosphore (N/P). Ils ont été mis en évidence par Redfield dans le phytoplancton marin et sont donc connus sont le terme rapports de Redfield : 106/16/1 respectivement pour C/N/P en nombre d’atomes. Ils sont aussi connus en agriculture sous le terme NPK (azote, phosphore et potassium) mais exprimés en poids. Le point important à retenir est qu’en nourrissant du plancton avec 300 atomes de carbone et 16 d’azote, seuls 106 carbones seront consommés. Toutefois les cellules, en prévision des périodes de pénurie, peuvent stocker une partie de l’excédent en carbone. La forme idéale de stockage est une molécule de type polymère et insoluble dans l’eau. Les matières grasses sont les plus communes, mais dans le cas précis qui nous intéresse, la molécule de stockage est un polyester : le PHA. Quand elle a de nouveau du carbone, la bactérie va dégrader progressivement le PHA et l’intégrer dans son métabolisme.

Le PHA est un bioplastique naturel produit à partir de déchets par fermentation.
En cultivant ces bactéries dans des conditions appropriées, il est donc possible de leur faire produire du PHA de différentes compositions et en quantités importantes. La matière première utilisée pour nourrir ces bactéries doit être riche en carbone. Ce peut être des sucres ou des huiles ou d’autres types de matières. La fermentation est un procédé bien connu et maitrisé à grande échelle. Elle offre l’avantage d’être très économique par rapport à une synthèse chimique. Le modèle économique de cette production va donc dépendre essentiellement de la matière première utilisée comme source de carbone. Si des matières raffinées comme les sucres sont utilisés, les PHA produits auront un prix élevé. C’est pourquoi les industriels se tournent vers les huiles usagées ou les déchets organiques qui sont beaucoup moins chers. Dans ce cas, la production apporte aussi un service écosystémique qui peut être valorisé économiquement. Cette étude présente une bonne revue des connaissances sur le sujet.

Des rats et des asticots pour extraire le PHA.
Dans les procédés de fermentation, on choisit en général la voie qui conduit au produit que l’on souhaite sous forme extracellulaire. Ceci permet de le séparer facilement par simple centrifugation en fin de procédé. Le PHA est une forme de molécule intracellulaire qui ne diffuse pas à l’extérieur de la cellule. Il est donc nécessaire de l’extraire de la cellule pour le purifier et d’éliminer tous les autres composants cellulaires : protéines, polysaccharides, acides nucléiques, parois cellulaires… Cette étape est réalisable chimiquement, mais induit un surcoût dans la production. Des études ont mis au point un cocktail d’enzymes pour cette étape, mais encore peu adapté aux grandes productions. Les recherches continuent sur ce sujet. Les auteurs présentent aussi deux initiatives originales par voie biologique qui ont été testées à grande échelle en Malaisie. Elles ont le même principe en commun : nourrir des animaux avec la biomasse de bactéries qui contiennent le PHA, réduite sous forme de boulettes, puis collecter leurs excréments. Le PHA est résistant à la digestion et se retrouve donc intact mais libéré de la cellule bactérienne qui, elle, est digérée. Il est séparé facilement du reste des matières par lessivage et filtration. Cette approche a été utilisée avec des élevages d’asticots et avec des rats. Le meilleur rendement a été observé avec les rats.

Les PHA sont des polymères biodégradables dans l’eau de mer.
Les études de biodégradabilités des PHA montrent qu’ils sont globalement transformables en composés élémentaires quelle que-soit leur forme. Leur vitesse de dégradation dépend de leur degré de réticulation et du rapport poids/surface de l’objet. En effet, plus l’objet en PHA sera colonisé par des bactéries, plus rapide sera la dégradation. Donc à partir d’un morceau épais qui se dégrade lentement, la fragmentation va augmenter exponentiellement la vitesse de dégradation car la surface disponible à la colonisation bactérienne va augmenter rapidement.
Dans une logique d’économie circulaire parfaite, la biodégradabilité n’est pas une caractéristique essentielle. Toutefois, en cas de fuites de matières vers l’environnement, elle assure une réduction des effets néfastes sur les écosystèmes. Le recyclage matière des PHA n’a pas encore fait l’objet de beaucoup d’études, mais sa biodégradabilité rapide permettait d’envisager une réinjection des résidus comme source de matières nutritives dans les fermentations.

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