Eve Bourdon – Parcours d’une ingénieure engagée

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À l’occasion de la Journée des femmes et filles de sciences, The SeaCleaners vous présente Eve Bourdon, sa cheffe de projet au sein de Manta Innovation, pour célébrer toutes celles qui participent activement au développement des solutions de demain.

Il est 10h du matin. Eve a réussi à caler une heure pour que l’on puisse échanger, malgré son emploi du temps bien chargé. Le soleil breton éclaire son appartement. La Trinité-Sur-Mer et le Morbihan, elle n’y était pas destinée, tout comme l’ingénierie d’ailleurs. Pourtant, aujourd’hui, sa volonté et ses convictions l’ont conduit à devenir Cheffe de Projet chez Manta Innovation, le bureau d’ingénierie de The SeaCleaners. Retour sur un parcours dicté par la force d’esprit et la passion.

Savoir s’écouter et ne rien lâcher

École de cirque, alpinisme, escalade… Née et élevée à Paris, Eve avait beaucoup d’énergie à revendre. Sa passion pour la moto sur piste dès ses 17 ans n’est en rien étrangère à son goût pour les outils et la mécanique qui lui servent au quotidien dans l’exercice de sa profession.

« J’avoue que je suis assez sportive, dynamique et volontaire et que j’aime découvrir et apprendre : ce sont mes forces. »

À l’école, elle opte pour une orientation scientifique, malgré les réticences de ses professeurs en seconde qui lui conseillaient la voie littéraire. Elle arrive pourtant à passer son bac S (en deux fois, avoue-t-elle en rigolant) et arrête ses études, n’ayant pas encore trouvé sa voie. Après plusieurs petits boulots (d’équipière dans un fast-food à caissière en supermarché…), elle décide rapidement de reprendre le chemin de l’école.

« J’ai passé et obtenu mon brevet de technicienne supérieure en Biochimie. A l’époque je voulais travailler dans la recherche en laboratoire. Mais pendant 2ans ½, après des passages à l’INRA dans le milieu de la Recherche et plusieurs postes de travail en laboratoire d’analyses bactériologiques, je ne me voyais pas d’évolution à long terme et je commençais déjà à m’ennuyer derrière une paillasse (*plan de travail en faïence des techniciens en laboratoires). Je me suis dit que je pouvais mieux faire et qu’il fallait que j’essaye d’aller plus loin. »

À 26 ans, Eve décide de reprendre ses d’études d’ingénieur en alternance avec le CESI et entre en apprentissage de 3 ans dans une usine de production de L’Oréal en Picardie.

« J’avoue que ça n’a pas été facile tous les jours entre les cours, les stages à l’étranger, les devoirs, les déplacements. Surtout pour une biochimiste, difficile de valider les modules de mécanique et d’électronique par exemple. Il y avait aussi très peu de filles : 10 filles pour 130 garçons environ. Mais l’alternance est beaucoup orientée sur le soutien de la promotion, on est là pour ‘apprendre à apprendre’ en s’appuyant sur les spécialistes de chaque domaine, et la formation est plus généraliste qu’en cursus d’école d’ingénieur classique. »

Elle enchaîne en tant que consultante en gestion de projet jusqu’en 2017. 12 années réparties entre Paris et l’Ouest de la France.

« Je ne voulais pas rentrer directement dans une grosse entreprise, mais profiter du consulting pour découvrir différents secteurs d’activités : automobile et projets de développement chez RENAULT, aéronautique avec des projets de développement chez AIRBUS, STELIA, projet dans l’énergie chez TOTAL, et même des projets militaires chez SAGEM. »

Et, en 2017, ce qu’elle appelle le « grand chamboulement de sa vie » : une année sabbatique sur les routes asiatiques pour voyager et découvrir le monde.

Choc des cultures et prise de conscience

« Nous avons fait 28000 km à moto à travers les pistes au Vietnam, au Cambodge, en Indonésie, en Thaïlande et au Laos sur une vieille Yamaha SR 250 de 1981. Evidemment, c’est au cours de ce voyage et des découvertes des villages et des plus beaux sites de plongée au monde, envahis de déchets, que j’ai pu voir de mes propres yeux les dégâts de la prolifération et non-gestion des déchets et du plastique en particulier sur les écosystèmes terrestres et marins. Nager au milieu des tortues, des raies Manta, des couches culottes et des tongs… ça m’a bouleversée vraiment !! Je me suis alors promis que je m’engagerais à mon retour dans plus d’actions. »

À son retour en France, entre le froid hivernal et, ce qui sera sa dernière mission en tant que consultante, dans une raffinerie, le choc est brutal. Alors lorsqu’un soir elle assiste à une conférence d’Yvan Bourgnon, sur ses aventures et son association, son but est clair : mettre son énergie et ses compétences à trouver des solutions et à faire avancer des projets comme le MANTA et la sensibilisation qui ont du sens. Après une candidature spontanée, Eve intègre officiellement The SeaCleaners en Mars 2020.

« Lorsqu’on voit ‘en vrai’ les dégâts de la pollution sur les écosystèmes mais aussi les humains, les enfants, on ne peut plus être la même ; on se pose beaucoup de questions sur l’orientation et l’avenir de la planète, sur soi… on lève la tête, on prend du recul et notre vision devient beaucoup plus globale. Il n’y a plus ‘ma vie’ et celle des autres mais une seule et unique planète. Voilà ce que j’ai appris de ce voyage : il faut changer ; que l’homme s’occupe plus de préserver la nature. »

« C’est pourquoi j’ai voulu travailler dans l’écologie pour agir et prendre le virage du changement, non seulement à mon échelle mais le plus largement possible. Pour moi, la filière de l’écologie prend en compte l’amélioration de la qualité de vie de tous ET de la planète, je trouve que c’est un travail qui a du sens vraiment. »

“Travailler chez The SeaCleaners, c’est plus qu’un travail, c’est un engagement, une envie de faire bouger les lignes et de sensibiliser. C’est aussi un projet dont je suis fière (plus que de produire des avions ou des voitures), qui a du sens et qui est en accord avec mes valeurs. J’espère que le travail de tous à TSC pourra produire suffisamment de vagues nécessaires à la prise de conscience de la préservation des océans.”

Eve Bourdon Cheffe de Projet, Manta Innovation

Allier ingénierie et environnement

Mettre la technologie au service de l’homme, mais aussi de la nature, c’est ce qu’Eve a réussi à combiner dans son nouveau post. Et d’après elle, le métier de chef.fe de projet est amené à se développer, aussi bien en France qu’à l’international.

« Je pense que c’est une filière d’avenir pour l’ingénierie oui mais pour tous les corps de métiers en fait. On passe et on passera de plus en plus d’énergie, d’argent et de temps à développer des technologies et solutions performantes pour atteindre les objectifs de réduction des pollutions, avec de grands chantiers comme la filière du recyclage, de l’économie circulaire, de la gestion des déchets, du respect des quotas, de la production d’énergies verte, du développement de technologies (hydrogène, électricité verte, production plus respectueuse, etc…). »

À toutes les femmes de sciences

Mais c’est comment d’être cheffe de projet dans un milieu majoritairement masculin ? Pour Eve, la question ne se pose finalement presque pas.

« Je pense qu’il n’y a ni hommes, ni femmes mais juste des personnes et des projets. Donc être chef de projet qu’on soit homme ou femme, c’est la même chose. Il faut avoir de bonnes qualité organisationnelles et relationnelles. »

« Après c’est vrai que sur certains projets, où on se retrouve la seule femme face à des hommes sur les chantiers, il vaut mieux avoir une certaine assurance. On sent qu’on est jugée d’abord parce qu’on est une femme et ensuite sur nos compétences de cheffe de projet. Ça fait donc deux marches à passer et beaucoup de confiance à gagner. Mais c’est faisable et ça s’est toujours bien passé pour moi. »

Alors si Eve avait un message à faire passer à toutes les jeunes filles qui souhaitent s’engager dans des études d’ingénierie ou de sciences, voici ses précieux conseils :

“Essayez, vous n’avez rien à perdre et tout à gagner !”

« Seule vous-même pouvez savoir si ça vous plaira ou pas et si vous en êtes capable. Ne laissez pas les a priori vous bloquer. L’ingénierie, c’est l’assurance de ne pas s’ennuyer au travail car l’ingénierie est passionnante et jamais routinière. Les ingénieurs français sont appréciés dans le monde entier. Il y a plein de domaines différents, le tout est de trouver celui qui vous plait. Ça vaut le coup d’essayer.

Ne vous bloquez pas sur l’anglais, on sait bien que les Français ont du mal avec les langues étrangères. Mais il vaut mieux le travailler le plus tôt possible car de plus en plus de projets sont internationaux et les échanges en anglais nécessaires. Lisez, écoutez, faites des Mooc, faites des séjours en Angleterre ou ailleurs et ça viendra. »

 

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