Des microplastiques dans le sang et les poumons des êtres humains : de l’urgence d’agir pour la recherche scientifique.

La recherche scientifique sur l’impact de la pollution plastique est une discipline récente, et les scientifiques s’accordent à dire que nos connaissances sur le sujet sont encore embryonnaires.

Au fur et à mesure que la recherche s’organise, les avancées scientifiques sont nombreuses et chaque nouvelle étude sur les conséquences de notre addiction au plastique tombe comme un couperet. Nous savions déjà que les êtres humains ingéraient et inhalaient des microplastiques, jusqu’à 121000 microparticules par an pour un adulte, ou tel que le figure une “comparaison” controversée, l’équivalent d’une carte de crédit (5 grammes) par semaine.

Depuis qu’un nouveau procédé pour détecter les microparticules plastiques accumulés dans le corps humain a été validé par la communauté scientifique en 2020, les études attestent de conclusions choquantes : des microplastiques détectés dans le sang humain de 80% des personnes testées, des microplastiques découverts dans les poumons de 11 patients sur les 13 prélevés lors d’une chirurgie… des microplastiques dans les intestins, les placentas de foetus, chez les nourrissons…

Si la preuve de la présence de microplastiques dans nos corps n’est maintenant plus à apporter grâce à ces récentes études très médiatisées (à juste titre), ces percées scientifiques ne sont sans doute que la partie émergée de l’iceberg.

Britta Denise Hardesty I ©CSIRO

Interrogée par The SeaCleaners en octobre 2021, Britta Denise Hardesty, Principal Research Scientist au CSIRO Oceans and Atmosphere et membre du Conseil Scientifique International de The Seacleaners expliquait :

“Malgré tout ce que nous savons sur la pollution plastique, il reste encore de grandes inconnues. Nous savons que le plastique contient des imitations d’hormones, des perturbateurs endocriniens. Des travaux ont montré que les humains absorbent du plastique dans l’air qu’ils respirent, dans la nourriture qu’ils mangent et dans l’eau qu’ils boivent. Il y en a vraiment partout, tout le temps, et de plus en plus. L’une des grandes questions qui se pose, et elle est très difficile à étudier, car il est impossible d’étudier une population d’humains qui n’aurait pas été exposée au plastique, c’est : “Quel est l’impact réel démontré des dommages causés aux humains par la pollution plastique ?”“Quel est l’impact sublétal ou même létal de l’ingestion de plastique ou de l’exposition à celui-ci ?” Ce sont des questions que des équipes de recherche du monde entier s’efforcent de mieux comprendre.”

La vitesse à laquelle le plastique a envahi notre quotidien est impressionnante. Et les chiffres en témoignent. La planète consomme aujourd’hui 265 fois plus de plastique qu’en 1950.

De 1950 à 2017, on estime que 9,2 milliards de tonnes de plastique ont été produites dans le monde. Et cette production mondiale ne cesse de progresser d’année en année. Elle est passée de 1,5 million de tonnes en 1950 à presque 400 millions de tonnes en 2015 (Geyer et al., 2017)

Selon les estimations, elle pourrait plus que doubler d’ici 2050. Des chiffres qui ne peuvent que nous laisser interrogateurs face aux nombreuses inconnues sanitaires.

En 2019, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) appelait à renforcer la recherche sur les microplastiques présents dans l’environnement et leurs conséquences potentielles sur la santé humaine. Tout en reconnaissant qu’il était « urgent d’en savoir plus » et que les informations disponibles étaient « limitées », la gardienne de la santé mondiale appelait alors à « prendre des mesures énergiques » pour réduire la pollution par le plastique, afin de protéger l’environnement et réduire l’exposition humaine.

Déterminer les conséquences de la pollution plastique sur la santé humaine doit, dès aujourd’hui, devenir une priorité de la communauté scientifique, afin de guider un encadrement légal à l’échelle mondiale qui permettrait d’endiguer la déferlante de pollution plastique qui ne fait que commencer.

A l’heure où s’écrit le futur traité international contre la pollution plastique, qui sera juridiquement contraignant, il est urgent que la communauté scientifique internationale bénéficie de réels financements pour creuser cette question et éclairer la décision publique avec des données scientifiquement fondées.

SOURCES

https://www.theguardian.com/environment/2020/aug/17/microplastic-particles-discovered-in-human-organs https://www.theguardian.com/environment/2022/mar/24/microplastics-found-in-human-blood-for-first-time https://www.theguardian.com/environment/2022/apr/06/microplastics-found-deep-in-lungs-of-living-people-for-first-time https://www.who.int/fr/news/item/22-08-2019-who-calls-for-more-research-into-microplastics-and-a-crackdown-on-plastic-pollution 
https://www.nature.com/articles/d41586- 021-01143-3
Geyer, Roland et al. “Production, use, and fate of all plastics ever made.” Science advances vol. 3,7 e1700782. 19 Jul. 2017, doi:10.1126/sciadv.1700782

 

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